Par Julien Leconte
Le "Wonder Woman" de 2017 — bien reçu par les critiques et le public à sa sortie — se concluait sur une tragédie personnelle pour l’héroïne. Nous retrouvons donc logiquement sur nos écrans la suite des aventures Diana l’amazone, cette fois en pleine période eighties, telle que nous l’annonce vigoureusement l’affiche clinquante du film.
Que l’on ait vécu la période ou non, la bande-annonce bien funky et bariolée de "Wonder Woman 1984" n’augure que du bon scénario à la sauce fluo, plus d’humour et du second degré pop pour alléger le tout. Histoire de compenser la noirceur de l’univers DC des autres films, on apprécie la volonté de passer autre chose que des scènes de nuit et des superhéros qui font la gueule. La scène d’intro de "Wonder Woman 1984" ayant été officiellement divulguée par le studio sur le web, tout semble réuni pour compléter l’histoire de Diana et développer son évolution de super-héroïne à l’âge adulte.
Gal, Chris, Pedro, et les autres
Il faut avouer avant toute chose que le casting avait de quoi rassurer. Entre un Pedro Pascal en plein boum après "Narcos" et "The Mandalorian", une Gal Gadot enfin débarrassée de son statut de bimbo et une Kristen Wiig en pleine tentative de récupération de son image « sérieuse », il n’en fallait pas plus pour que les fans de DC et autres aficionados de superhéros accueillent ce second opus à bras ouvert. Si on rajoute Patty Jenkins toujours aux commandes, après avoir négocié d’une main de maîtresse sa liberté créatrice pour cette suite auprès des studios, aucun doute que "Wonder Woman 1984" allait au pire égaler le "Wonder Woman" de 2017. Sauf que, près de 15 minutes après une première scène de joyeux virtuoses, on commence à sentir l’entourloupe dans ce "Wonder Woman 1984".
Wishmistress
On le sait, même si l’interprétation n’est pas au top, un bon scénario peut parfois rectifier le tir. Sauf qu’ici, côté tir, Jenkins tire en rafale sur tout ce qui bouge. Récupérant la main sur le scénario (exit la supervision de Snyder qui reste uniquement producteur), la réalisatrice à la vision pourtant « posée » sur le premier "Wonder Woman" veut ici envoyer tout ce qu’elle a comme idée, comme thèmes, en dépit de toute logique narrative et en sacrifiant le rythme au passage.Entre une focalisation maladive sur des personnages ultra-caricaturaux, un besoin permanent d’appuyer les thématiques #metoo ou #incel dans les scènes « civiles » et des rebondissements tout droit sortis des pires séries B (ou Z, si on ne juge que par la séquence du convoi), la réalisatrice prend à contre-pied tout son travail effectué sur le premier opus.

Remember WW75, forget WW84
Presque aucune promesse n’est tenue, les eighties ne servent que de toile de fond pour cumuler les styles vestimentaires douteux (pour en faire des sketches), alors que "Captain Marvel" lui, jouait plus adroitement des codes des années 90. Le spectacle est aux abonnés absents, soit parce qu’il tarde à susciter notre intérêt, soit parce qu’il finit noyé dans une mièvrerie qui n’a d’égale que la vacuité des dialogues.On passera allégrement sur la némésis Cheetah, complètement bâclée et qui nous rappelle les heures sombres du "Catwoman" de Pitof dans l’affrontement final, et on préférera presque s’attarder sur les scènes intimistes où le duo Gadot/Pine semble le plus à l’aise, et sur les 15 dernières minutes de métrage où Jenkins semble se remémorer les bases du storytelling et le fan-service ultime (la scène post-générique). Reste un film totalement anecdotique, inutilement gonflé pour tenir 2h30, bourré de choses à dire, mais que le public n’a pas forcément envie d’entendre encore et encore. Si le talent de Patty Jenkins est indéniable sur beaucoup d’aspects techniques, gageons qu’elle saura réorganiser sa « vision » et sa direction d’acteurs pour son prochain "Cléopâtre".
"Wonder Woman 1984" s’ajoute donc à la longue et triste lignée des films DC qui auront raté le coche, et on ne pourra pas désigner la pandémie comme coupable de cette production beaucoup trop brouillonne pour le simple sujet qu’elle abordait. On aurait presque envie de se refaire la série avec Lynda Carter pour oublier tout ça. Presque...